Kinshasa Pluie

La nuit du 2 mai a transformé Kinshasa en théâtre de désolation. Une pluie torrentielle, d’une rare intensité, s’est abattue sur la capitale congolaise, provoquant la mort d’au moins six personnes, dont plusieurs enfants, et laissant derrière elle un sillage de destructions. Quartiers sinistrés, routes effondrées, habitations ravagées : la ville se réveille meurtrie, une fois de plus surprise par l’impréparation face aux caprices d’un climat de plus en plus extrême.

Une nuit noire sur la capitale

À Kinshasa, il a suffi de quelques heures de pluie pour que la réalité bascule dans le cauchemar. Dans la nuit du 2 mai, le ciel s’est ouvert sans retenue, déversant sur la mégapole congolaise des trombes d’eau qui ont tout emporté sur leur passage. Résultat : au moins six morts, dont une majorité d’enfants, et des quartiers transformés en champs de ruines.

Le quartier Camp Luka, dans Ngaliema, incarne cette tragédie. Là, les cris se sont tus sous les flots : cinq vies, principalement des enfants, ont été arrachées à la nuit. « Le caniveau était bouché. Quand l’eau a débordé, c’était trop tard », souffle Don De Dieu, témoin du drame. À Mont Ngafula, c’est une fillette de neuf mois qui a péri dans un éboulement silencieux, avalée par une terre rendue instable.

Ce n’est pas seulement la pluie qu’on redoute désormais à Kinshasa. C’est son imprévisibilité, sa violence, sa manière de frapper là où le béton est fragile et les politiques d’urbanisme, quasi inexistantes. Dans une ville qui s’étend sans plan, chaque saison des pluies devient un pari sur la survie.

Entre chaos urbain et colère populaire

Le décor post-apocalyptique s’étend bien au-delà de Camp Luka. À Kisenso, commune déjà gangrenée par l’érosion, des pans entiers de terrain se sont effondrés, emportant maisons, souvenirs et parfois vies. Le bourgmestre, Godé Atshwel Okel, tire la sonnette d’alarme : « L’érosion avance, les dégâts sont partout, dans presque sept quartiers. » Mais qui écoute vraiment ?

À Mont Ngafula, ce sont les routes elles-mêmes qui ont cédé. Le By Pass, axe névralgique, a été coupé en plusieurs points, bloquant une circulation déjà anarchique. À Ngaliema, l’avenue du Tourisme n’a plus rien de touristique.

Même les réseaux de télécommunications ont flanché. Le réseau Vodacom, pilier du quotidien urbain, est devenu fantôme. Coupé net par une fibre sectionnée, comme un symbole de la rupture entre le centre-ville et ses périphéries vulnérables.

Dans les rues de Limeté, Kalamu ou Kintambo, les traces de la furie sont partout : maisons éventrées, avenues englouties, toitures envolées. Deux personnes ont même été blessées par l’effondrement d’une salle de fête à Kintambo. Comme si la pluie, dans sa colère, avait voulu éteindre aussi les derniers éclats de joie.

Kinshasa pleure ses morts. Mais ce deuil devient récurrent. À quand une vraie stratégie pour renforcer les infrastructures et protéger les plus vulnérables ? En attendant, chaque goutte de pluie reste une menace latente dans une ville au bord du débordement.

Lire aussi :