M23-Taux-Goma

Depuis le début de la rébellion armée du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo, la gestion des territoires occupés ne se limite plus aux opérations militaires. Une des promesses fortes du mouvement concernait la « stabilisation monétaire ». Les rebelles avaient annoncé un taux fixe : 1 dollar américain pour 2 500 francs congolais (FC). Pourtant, la réalité actuelle dans les villes sous leur influence, notamment Goma et Bukavu, est toute autre : le dollar s’échange désormais entre 2 800 et 3 500 FC, selon le lieu, le besoin et le contexte. Cela représente une déviation de jusqu’à 23 % par rapport au taux promis.


Une promesse de stabilité… vite dépassée par les faits

Au lancement de l’offensive du M23, la fermeture des banques traditionnelles dans les zones conquises avait créé un effet paradoxal : le franc congolais s’était momentanément renforcé, en raison de la raréfaction du dollar et du contrôle temporaire exercé sur les taux de change.

Les rebelles y voyaient une opportunité politique : rassurer la population, asseoir leur autorité et se positionner comme des gestionnaires capables d’offrir une stabilité que Kinshasa peinait à garantir.

Mais cette illusion n’a pas duré. L’absence d’un système bancaire fonctionnel, la dépendance aux circuits informels et l’instabilité générale ont vite miné ces efforts. Le dollar, toujours en demande pour les transactions importantes (frais scolaires, électricité, transferts mobile money), est devenu une denrée rare… et donc plus chère.


Les taux varient selon le secteur : un chaos monétaire organisé

Dans les faits, les citoyens de Goma et Bukavu jonglent avec des taux fluctuants au gré des circonstances. Un retrait via Airtel Money se fait autour de 2 800 FC, tandis que les écoles exigent jusqu’à 3 500 FC par dollar. Pour payer l’électricité, le taux tourne autour de 3 200 FC, et les cambistes de rue proposent des taux à 3 000 FC. Pendant ce temps, dans d’autres régions du pays où l’autorité de l’État reste en place, le taux moyen reste autour de 2 850 FC.

Cette variabilité illustre un point fondamental : le M23 ne contrôle pas l’économie, il la subit. Sans infrastructures bancaires, sans réserve de change ni régulation crédible, il est pratiquement impossible d’imposer un taux fixe, surtout dans une économie de guerre dominée par l’informel et la méfiance.


La promesse du M23 de maîtriser la monnaie locale s’est heurtée à la dure réalité économique d’une zone en conflit. En l’absence de leviers financiers concrets, la stabilité monétaire reste un mirage. Et pour les populations locales, chaque transaction devient un combat de plus, dans un quotidien déjà marqué par l’insécurité et l’incertitude.